Dana Vespoli bouscule le porn

Dana Vespoli est en train de changer la face du porn, doucement, à petit coup de strap-on dans les fesses des fappeurs et des fappeuses. Depuis plusieurs mois, l’actrice-réalisatrice nous balance ses prods à la gueule sans se soucier de leurs répercussions. Chaque fois que j’en visionne une,  je suis bouleversé et j’ai besoin d’un arrêt de travail de trois jours pour m’en remettre.

Dana Vespoli a débuté dans l’industrie en 2003, elle avait déjà 31 ans et en poche un diplôme en littérature comparée, ainsi qu’en français. Il n’en fallait pas plus pour me séduire, elle parle notre langue, l’aime et la lit. Je suis tout chamboulé. Sans verser trop dans le côté intello chiant, Dana cite quand même des sources d’inspiration plutôt balaises : « Mes prods Evil Angel sont largement puisées dans Dante Alighieri, Rainer Maria Rilke, Roland Barthes et Susan Sontag. » Elle rajoute aussi David Lynch, Mary Gaitskill et Woody Allen. « J’étais aussi fan de Radley Metzger et Catherine Breillat, qui a fait des films fantastiques sur la sexualité des femmes et leurs désirs. » En principe, quand quelqu’un évoque Roland Barthes, je me barre sans dire au revoir (il est servi trop souvent à toutes les sauces), mais j’ai fait une exception pour Vespoli et je me prépare à mater sa filmo dans la soirée pour y débusquer l’influence des grands auteurs et cinéastes qu’elle mentionne.

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Dana assume le bon et le mauvais

Le parcours de Dana est chaotique. En 2005, elle plonge dans la cocaïne salement et garde un souvenir bien moisi de cette période durant laquelle elle continuait à performer. « C’était un mauvais moment de ma vie et pour toujours enregistré sur pellicule. Mais en même temps, quand je vois ça, je me rappelle juste le chemin que j’ai parcouru depuis. » Avec une scène de gang bang, ce sont les seuls mauvais côtés qu’elle a vécu dans le porno. Elle refuse depuis la pluralité masculine.

Tout le reste, Dana Vespoli en est très fière : « je ne me suis jamais sentie honteuse de rien de ce que j’ai pu faire ». Elle n’arrête pas, dans les interviews, de dire combien elle fut fortunée d’avoir rencontré les bonnes personnes et d’avoir pu s’exprimer comme elle l’entendait. « Je ne dis pas que des trucs bien merdiques n’arrivent jamais, mais j’ai été assez chanceuse de me trouver de l’autre côté. Il y a plein de gentillesse ici aussi. Quand j’essayais de me sortir de la coke, beaucoup de monde du business m’a appelé et offert de m’aider. » Le porn lui aura aussi apporté l’amour, un temps, en la personne de Manuel Ferrara avec qui elle s’est mariée et a eu trois rejetons. Les deux figures du porn américain sont restées très amies, « on ne tourne plus ensemble, mais je le filme dans des scènes. Il me filme aussi. Je réalise pour lui quand il a d’autres choses à faire. » Un travail d’équipe harmonieux qui prouve que nous avons affaire à des gens de bonne intelligence.

La brune irlando-thaïlandaise quitte l’industrie en 2009 pour un long moment, histoire de s’occuper de ses mômes et de respirer autre chose que les odeurs de lubrifiant. D’après ce que j’ai cru comprendre, elle retourne dans le milieu vers la fin 2011 pour reprendre la caméra, ce qu’elle avait commencé en 2006. Depuis, elle alterne entre actrice et réalisatrice pour des productions de qualité chez Mile High Media et Evil Angel.

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Dana touche à tout, mais surtout à ce qui est différent. Elle est queer. Quand elle était plus jeune, elle avait tendance à dévier de la norme sexuelle et elle s’amusait avec ses petits copains : « Je les habillais avec des vêtements féminins. » Faire du porn lui semble d’une logique imparable dans son parcours. « J’avais toujours eu cette idée de jouer dans du porno et d’en réaliser depuis que j’étais diplômée et que je travaillais chez Mitchell Brother (un club de strip) comme girl/girl performeuse. J’ai fini par rencontrer beaucoup de porn stars et, après avoir déménagé à L.A. et travaillé en coulisse sur des films softcore, j’ai décidé de me lancer. »

Sa carrière ne déçoit pas, surtout ces derniers mois, où elle se lâche vraiment chez Evil Angel (EA). Dana est une fétichiste à plein de niveaux, elle aime les dilatations anales, les pieds, la fessée, les sécrétions du corps en tout genre et aussi « j’aime sentir les gens qui m’attirent ». Dana peut venir renifler mes aisselles quand elle le souhaite, j’ai déjà les bras levés.

Dana explose les normes

Avec ce côté kinky, Vespoli produit des choses plutôt intéressantes et rares. Au-delà de ses films lesbiens, les trans l’excitent beaucoup. Elle tourne avec elles pour EA des œuvres mixtes, où le sexe se mélange sans plus aucune barrière de tag ou autre. Ce film s’intitule élégamment TS, I love you. Ça part dans tous les sens, vous serez prévenus. Il y a une scène hétéro dans la norme, une où elle se tape une shemale, une où Dana et TS Foxxxy se font un mec sub (soumis) et une dernière où le fameux Christian XXX, une version chauve du Hulk, et la belle Jessy Dubai s’enculent joyeusement à tour de rôle (cette scène m’a causé une remise en question et un arrêt de travail). Cette variété n’existait pas, à ma connaissance avant sur un produit de cette qualité et distribué à grande échelle. Commercialement, TS, I love you semble dur à vendre. Certes, les trans sont populaires, mais elles se cantonnent plutôt à des positions passives ou restent entre elles pour les productions à large audience. Le public masculin représentant toujours la majorité de la clientèle, EA a fait un choix courageux en éditant ce film atypique.

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John Stagliano, le patron d’EA, soutient à fond Dana dans ses envies. Lors de la sortie de Girl/Boy, le milieu a tressailli. Avec Jiz Lee et Manuel Ferrara en vedette, le film réunifiait deux mondes, le queer et le mainstream. La passionaria du porno alternatif et féministe se tape le demi-dieu du porno hétéro, on ne pensait jamais voir une telle chose. Jiz ne tourne presque jamais avec des mecs issus du mainstream, elle a fait une exception pour Dana et cela nous donne une scène très intense. Là encore, dur de vendre, aux habitués du porn Evil Angel, familiers de Rocco et de ses poupées dociles de l’Est, un film où l’actrice sur la jaquette à du poil au mollet, où les femmes dominent les mecs et où Valentina Nappi se prend des doubles assaisonnées strap-on et grosse teub.

Dana explose donc les frontières du porno mainstream sur son char Leclerc du vice, elle écrase les conventions, mais en douceur ; elle distille le queer, la différence et l’amour sagement, subtilement. Elle tente de créer une ambiance sur ses plateaux, « l’environnement autour de la scène est très important pour moi ». La séduction l’intéresse bien plus que la romance un peu cul-cul. Les films de Dana ne transgressent pas seulement les clichés, allant au-delà du gonzo, ils amènent aux fappeurs le spectacle de personnes en connexion qui baisent pour le plaisir et sont complices. Enfin, ce n’est pas toujours aussi raffiné, il lui arrive aussi de défoncer sans égard le cul des mecs avec Aiden Starr comme dans Femdom Ass Massacre: Extreme Humiliation. Âmes sensibles s’abstenir.

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La prochaine production de Dana s’intitule Hollywood Babylon et « ce film est une lettre d’amour à cette ville et à tous les espoirs et les rêves, ses grandeurs et ses horreurs tenus entre ses palmiers de celluloïd, le stuc des murs et notre inconscient collectif. » Sortie prévue le 30 avril, on vous dira si c’est bien.

Photos dans le texte de JM Darling et sources d’où sont tirées les citations : Sex.com, XCritic, Creative Loafing.

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