Piratage, revenge porn : comment réagir ?
Internet est un magnifique espace de liberté qui peut parfois se transformer en jungle dès qu’on décide de se montrer à poil. Actrices, acteurs, modèles cam, amateurs voient en permanence leur contenu repris, rippé, reposté sans leur autorisation sur des sites tiers, le plus souvent pour en faire un petit business. Ce problème touche également les photos intimes qui n’avaient pas vocation à être exposées publiquement, phénomène plus connu sous le nom de “revenge porn”.
Face à ces problèmes d’autorisation, d’exposition et de droits d’auteurs, sommes-nous impuissants ? Non, il existe la loi et toute une série d’outils mis à la disposition des internautes pour tenter d’enrayer le phénomène. Voici une liste qu’on espère la plus complète. Notre coup de pouce pour un Internet meilleur.
Article écrit à quatre mains par Gonzo & Carmina.
Les tubes porno : le cul entre deux chaises
La DMCA (Digital Millenium Copyright Act) est une loi américaine de 1998 qui vise à lutter contre la violation du droit d’auteur en ligne. Bien que cette loi soit américaine, elle est appliquée dans une très grande majorité des sites Internet. C’est le cas par exemple des tubes porno qui concentrent la majeure partie du trafic adulte depuis 2006.
C’est cette loi qui a permis à Youtube puis aux tubes porno comme Youporn de pouvoir exister. Ces sites sont considérés depuis 2005 comme des hébergeurs et non des éditeurs, ils ne sont donc pas responsables du contenu uploadé sur leur site (en dehors du cadre de la loi). Ils ont par contre l’obligation de retirer le contenu signalé, condition sine qua non à leur existence. La DMCA est une loi controversée mais considérez-la comme votre alliée.
Si vos images se retrouvent sur des tubes, que vous soyez un professionnel, un amateur ou un particulier, le premier réflexe à avoir est de remplir un formulaire DMCA (aussi appelé “Take Down Procedure”) que vous trouverez généralement à côté du bouton “signaler contenu” ou en bas de la page du site. Depuis peu, certains font la différence entre droit d’auteur classique et revenge porn (aussi appelé “contenu strictement amateur”). Nous signalerons cette subtilité importante dans les liens ci-dessous.
Si du contenu qui vous appartient se retrouve sans votre autorisation sur les principaux tubes, voici les procédures de signalement à suivre :
• Si vous êtes un studio ou un professionnel : Formulaire Pornhub / Formulaire Youporn / Formulaire Xhamster / Formulaire Xvideos
• Si vous êtes amateur ou victime de revenge porn : Formulaire Pornhub (précisez bien “no” à la question “Is this issue related to copyright infringement?”) / Formulaire Xvideos
Soyez le plus précis possible, ces informations sont strictement confidentielles (elles ne seront pas publiées en ligne). Plus elles seront claires et sans ambiguïté, plus la procédure ira vite. Malgré leur mauvaise réputation, les tubes réagissent assez vite et suppriment les vidéos rapidement (entre quelques heures et 24h). Il est important de ne pas paniquer et d’agir très rapidement pour éviter que le contenu se retrouve dupliqué un peu partout après leur mise en ligne.
Il est également difficile de retrouver son contenu dans l’immensité d’Internet. Pour ça, utilisez Google et vérifiez régulièrement que le contenu ne réapparaît pas. Vous pouvez d’ailleurs vous créer une alerte Google sur votre nom ou pseudo pour vous aider. Ces procédures peuvent être permanentes et fatiguantes mais au moins elles existent.
Le cas particulier de la sexcam
Les modèles sont quasiment tous victimes d’un business illégal de masse qui enregistre automatiquement et systématiquement la moindre de leurs apparitions en ligne pour ensuite proposer ces vidéos sur les tubes ou à la vente sur divers sites très bien indexés par Google. Il est donc habituel de tomber sur des milliers de résultats lors d’une simple recherche, en général un montage photo avec des captures d’écran du show à intervalles régulières qui mène vers le lien de téléchargement d’une vidéo.
Malheureusement, prévenir ce genre de problèmes est impossible à petite échelle. On peut poser des watermarks ou des logos DMCA un peu partout, mais ça n’empêchera pas le webmaster de recadrer l’image et de poser son propre watermark. Il faut donc agir a posteriori.
On vous recommande de chercher sur Google votre pseudo accompagné de mots-clés divers : cam, camgirl, videos, caps (pour “captures”) et même porn. En effet, la plupart du temps les titres des contenus piratés correspondent aux pseudos des modèles, accompagnés d’une ribambelle de tags porno (qui correspondent plus ou moins… Voire pas du tout) afin de les indexer le plus possible.
Pour les tubes porno, la méthode est celle citée plus haut et le traitement est rapide grâce aux watermarks des plateformes de webcam freemium. Pour les sites illégaux, il existe souvent un formulaire DMCA mais il est faux ou ne fonctionne pas. Il vous reste alors le formulaire DMCA de Google / Lumense et beaucoup de patience. Un travail fastidieux qu’il convient d’appliquer en intégrant différents tags dans ses recherches (sur Google, les tubes, et les réseaux sociaux) et surtout de le répéter dès que possible : plus ces sites prendront des signalements DMCA par Google, puis ils seront susceptibles de se faire totalement désindexer (bien qu’ils resurgiront sous un autre nom aussitôt).
Google : porte d’entrée d’Internet
Avec 95,46% de parts de marché en France sur les moteurs de recherche, Google reste la porte d’entrée privilégiée d’Internet, encore loin devant les réseaux sociaux. Si une vidéo ou une cam avec votre pseudo ou votre nom a été volée ou enregistrée, il y a donc de fortes chances que Google l’ait indexée. Il suffit de taper le nom d’une actrice ou d’un modèle pour s’en rendre compte : les premières réponses pointent le plus souvent sur du contenu volé. C’est encore plus vrai pour les séances de webcam qui se retrouvent indexées via des sites qui en font un business tout à fait illégal.
Malgré cette relative bienveillance envers les contenu volés, Google respecte le droit d’auteur et propose à leurs auteurs de pouvoir les supprimer de ses résultats. Pour cela il suffit de vous connecter dans cette partie un peu cachée des outils pour webmasters proposés par Google. Vous avez juste besoin d’un compte Google et vous n’avez pas besoin d’être propriétaire d’un site Internet.
Une fois sur cette page, renseignez les informations demandées sur votre identité (attention ici, votre nom sera affiché sur la base de données de Lumense, privilégiez donc votre pseudo si vous souhaitez rester anonyme), puis les informations sur l’oeuvre ou le contenu que vous souhaitez faire disparaître des résultats de Google.
Nous prendrons l’exemple ici de « Sabrina Cam », cam girl fictive victime de ripage de ses vidéos par des sites tiers. Notez qu’il est important de renseigner l’origine de l’oeuvre volée mais qu’il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve matérielle de l’existence de cette oeuvre. Pour la partie “emplacement du contenu” n’hésitez surtout pas à faire une liste très complète de tous les sites qui ont repris votre contenu, images comprises. C’est parfois très long mais tout se fait dans le même formulaire (dans la limite de 1000 liens par formulaire).
Vous attestez ensuite sur l’honneur les informations transmises puis signez le formulaire. Sachez que par l’intermédiaire de Lumense, Google prend très au sérieux ses demandes et les traite en quelques jours mais la procédure peut prendre du temps. Soyez patient.
Le cas du revenge porn
Les méthodes ci-dessus sont valables pour les contenus diffusés en ligne, volés et utilisés par des tierces personnes. Par exemple, si vous êtes photographe et que vous pouvez montrer dans le formulaire Lumense que vous êtes propriétaire des clichés, Google les désindexera. Mais quid des contenus privés volés et publiés sans votre accord ?
Le revenge porn ou “vengeance pornographique” est un phénomène de plus en plus médiatisé. Pour ceux qui n’en ont jamais entendu parler, il s’agit du fait de publier des photos sexuellement explicites de quelqu’un qui n’a pas donné son consentement à la dite publication. Le plus souvent, les photos sont publiées en guise de vengeance, ou dans le but de ruiner une réputation personnelle ou professionnelle. On pense à tort qu’il est apparu avec Internet, mais il existe sans doute depuis aussi longtemps que la photographie elle-même. Cependant, il n’est clairement identifié que depuis 2008 et il peine encore à être légalement reconnu.
En France, il a toujours été interdit de diffuser des photos ou vidéos prises dans le cadre privé, et ce grâce à cet article du code pénal que les victimes pouvaient obtenir justice. Les choses vont changer puisque la semaine dernière, un amendement visant à punir spécifiquement le revenge porn d’un an de prison et 45.000€ d’amende a été adopté afin de répondre à une ambiguïté d’interprétation de l’Article 226-1.
Mais avant d’en arriver là, il y a une marche à suivre légale à entamer. La première chose à faire si par malheur vous êtes victime est d’établir en urgence un procès-verbal de constat par un huissier, puis de déposer plainte. Bien entendu, ce genre d’affaire étant difficile à vivre pour les victimes, nous comprenons qu’il soit ardu d’en référer aux autorités, mais il est important que les responsables soient arrêtés pour leurs délits.
Après avoir engagé les démarches légales, vous pouvez contacter le webmaster du site ou du réseau social selon différentes méthodes, pour lui signaler qu’il diffuse des photos privées sans consentement. S’il ne les supprime pas, sa responsabilité pourra être engagée. Cependant, s’il s’agit d’un site spécialement créé pour vous nuire, il y a peu de chances que la personne qui vous harcèle décide de les supprimer. C’est à ce moment qu’il va falloir agir pour signaler les photos (selon différentes méthodes) afin qu’elles disparaissent.
Heureusement, depuis quelques mois, les principaux sites Internet et réseaux sociaux ont pris conscience du phénomène et réagissent rapidement pour l’éradiquer. Ainsi sur Twitter et Reddit, il existe maintenant un moyen de le signaler rapidement.
De son côté, Facebook se mouille beaucoup moins mais permet également de soumettre une photo à leur appréciation. A priori, si elle contient la moindre parcelle de nudité, elle ne devrait pas rester en ligne longtemps, mais le réseau social est connu pour avoir un sens de la morale particulier.
Il est également possible de déréférencer les images en utilisant les formulaires légaux de Google (ici et là), et en y répondant comme suit (avec les réponses à cocher) :
Pour un Internet meilleur
Tourner du porno pour soi ou pour tout le monde, faire de la cam pour une audience limitée ou large, s’amuser devant l’objectif ne devraient pas se heurter à la malveillances de webmasters ou de personnes de votre entourage. Internet est un terrain de jeu où les règles ne sont pas souvent respectées. Si vous êtes victimes de vol de contenu ou de revenge porn, il faut agir vite, méthodiquement et souvent répéter inlassablement la même procédure pour arriver à faire supprimer ou désindexer les images ou vidéos. Courage à tous.
Par exemple quand votre collaborateur a « testé pour nous » chaturbate ou cam4, est-ce que aussitôt il s’est retrouvé affiché sur voleurdecam.com ou même sur google images ?
Qui ça ? Si c’est moi, la réponse est oui mais pas immédiatement. C’est lié à la popularité des cams. C’est un lecteur qui m’a prévenu car j’étais sur Xhamster (et Motherless). J’ai fait un signalement, c’est parti en quelques heures et sur Motherless c’est parti tout seul (sûrement à cause du waterkmark). C’est jamais revenu je crois. Pour Carmina c’est beaucoup beaucoup plus souvent (elle en fait 2 fois par semaine environ). Sinon j’ai aussi aidé quelqu’un victime de revenge porn, si la vidéo est très vite signalée, elle n’est pas repiquée si vite que ça mais faut vraiment faire vite.