Jim McBride de Mr. Skin, l’histoire d’un collectionneur de boobs
Quand il était adolescent, Jim McBride s’amusait à enregistrer les scènes de nu de ses films préférés. À force de dégainer ses Betamax à chaque fois qu’une actrice dévoilait la moindre partie de son anatomie, l’américain a développé une connaissance encyclopédique de ces scènes olé-olé que nous avons tous tant aimé quand nous débordions d’hormones. Cette habitude aurait pu rester un hobby, mais il en a fait un métier. En 1996, alors qu’il faisait étalage de sa cinéphilie dans une soirée à Chicago, il a tapé dans l’oreille de l’animateur radio Harry Teinowitz. C’est comme ça que sa carrière d’expert des actrices nues à réellement pris son envol.
Sur les ondes de WMVP, Jim McBride a répondu aux questions libidineuses des auditeurs pendant quelques années avant qu’un fan ne lui suggère d’ouvrir un site Internet. Séduit par l’idée, notre homme a emprunté 70 000 dollars et s’est lancé. Entre mars et août 1999, il a lui même créé les fiches de 1 000 actrices dans la base de données de son futur site. Chacune contenait un nom, une photographie, un lieu de naissance, une petite biographie et surtout une liste détaillant tous les films dans lesquels la comédienne se dénude. Puis, le 10 août, l’entrepreneur audacieux a ouvert les portes de MrSkin.com.
Carton plein pour actrices nues
Aujourd’hui, Mr. Skin compte plus de 10 millions de visiteurs uniques mensuels. Jim McBride emploie 35 personnes à plein temps et plusieurs “Skin Scouts” chargés d’écumer les festivals à la recherche de bobines dans lesquels les comédiennes se dénudent. L’entrepreneur fait même travailler sa mère. Bombardée “Skintern”, c’est elle qui saisit les nouvelles données dans le catalogue du site. Environ 25 000 actrices y sont désormais répertoriées, agrémentées de 200 000 photos et vidéos. L’entrepreneur se refuse à dévoiler le montant exact de ses bénéfices, mais il est catégorique : Mr. Skin rapporte “beaucoup d’argent”.
Cette situation agréable ne semble pas menacée à court terme. S’ils abandonnent peu à peu le simple appareil sur grand écran, les acteurs n’en finissent plus de se déshabiller à la télévision. Contacté par le Tag Parfait, Jim McBride s’en frotte les mains : “Sachant que les cinémas privilégient de plus en plus les superproductions grand public, (…) nous sommes entrés dans l’âge d’or des célébrités nues à la télévision. Nous pensons que le prochain gros changement sera enclenché par les services de streaming et de VOD. Avec Orange Is The New Black et Narcos sur Netflix, Transparent et Hand Of God sur Amazon, les entreprises numériques prouvent qu’elles peuvent produire de très bons programmes pour adultes.”
Hollywood aime Mr. Skin
Bonne situation et bonnes perspectives : dans le domaine du divertissement pour adulte, l’assise confortable de Mr. Skin est remarquable. Pour en arriver là, Jim McBride a fait preuve d’astuce et provoqué la chance dès que possible. Sa première pirouette remonte à 1999, quand il a consulté un avocat pour s’assurer que son projet était légal. Celui-ci lui a conseillé de présenter Mr. Skin comme un site de critique cinématographique. Grâce à ce statut, il est libre de diffuser des images protégées par le droit d’auteur au nom du Fair use. Ainsi, en seize ans d’existence, il n’a jamais fait face à la moindre plainte.
Ce calme judiciaire est moins lié à un statut judicieux qu’au formidable potentiel promotionnel de Mr Skin. Les grands d’Hollywood adorent le site de Jim McBride car il leur permet d’attiser l’intérêt du public en lui faisant miroiter une scène de nu dans un film à venir. C’est la raison pour laquelle Universal, Fox, Paramount, Lionsgate et plus de 70 autres sociétés de production font régulièrement parvenir les DVD exclusifs de longs-métrages pas encore projetés en salles. “C’est pour ça que les scènes de sexe existent, parce qu’elles font vendre”, arguait crânement Jim McBride dans le New York Times il y a presque dix ans.
L’histoire d’amour qui unit Mr. Skin a Hollywood n’est pas unilatérale. En 2007, le réalisateur Judd Apatow a rendu hommage à la création de Jim McBride en la faisant mentionner par Seth Rogen et Paul Rudd dans son film En cloque, mode d’emploi. Ce juteux caméo avait été proposé à l’entrepreneur par la société de production Paramount un an plus tôt. Bien sûr, il avait immédiatement accepté. Une décision qu’il considère toujours comme “l’une de ses plus judicieuses”. On peut le comprendre : le nombre de visiteurs mensuels enregistrés par le site a gonflé de 35% le mois de la sortie du long-métrage.
Le très médiatique Mr. Skin
Le succès de Mr. Skin tient aussi au fait que Jim McBride est très médiatique et indissociable de son site. Mr. Skin, c’est lui ; ce surnom lui a été attribué par l’animateur radio qui lui a permis de faire ses premiers pas sur les ondes. C’est aussi sous ce pseudonyme qu’il a intégré l’équipe du célèbre Howard Stern Show en 2000. Après une seule apparition au micro, Jim McBride est devenu un intervenant régulier. C’est ce poste qui lui a ouvert les portes de la célébrité : Judd Apatow a découvert l’expert des actrices nues en écoutant le Howard Stern Show. L’entrepreneur y tient toujours sa Mr. Skin Minute. Chaque semaine, il donne également de la voix tous les jeudis dans Playboy Morning Show et le Rude Awakening Show de la station locale WOCM.
Si sa présence radiophonique et ses bonnes relations avec l’industrie cinématographique l’ont sans aucun doute aidé à s’imposer, Mr. Skin a aussi triomphé grâce à sa réactivité. En 2004, le site a su tirer parti du Nipplegate mieux que personne. En étant le premier à proposer des images du téton orné de Janet Jackson quelques heures seulement après son irruption télévisée, Jim McBride a attiré un très grand nombre d’internautes sur son site. Réactif, donc, mais pas opportuniste : en 2014, Mr. Skin a refusé de diffuser les clichés de célébrités révélés par le fappening. “Nous ne diffusons que des images dans lesquelles des acteurs et actrices ont accepté d’apparaître, tout en sachant qu’elles seraient vues par le monde entier”, avait-il alors expliqué au Telegraph.
Prétentions mainstream
Ce mélange de malice, de bonne image publique et de pratiques convenables a beaucoup réussi à la petite entreprise de Jim McBridge. Tant et si bien qu’au début des années 2010, l’entrepreneur a décidé d’étendre les limites de son domaine. La variante masculine de Mr. Skin, Mr. Man, a ouvert ses portes au mois d’octobre 2013. En février 2014, Jim McBride s’est offert le site d’information pornographique Fleshbot par le biais de sa société SK Intertainement. Jusqu’alors, le site appartenait au groupe de médias Gawker (Kotaku, Gizmodo…). L’entrepreneur explique : “Sous la coupe de Gawker, Fleshbot a été un très bon site pendant de nombreuses années. C’était aussi un bon partenaire commercial. Nous avons très mal vécu la décrépitude du site (sic), nous savions que nous pouvions lui rendre son éclat, alors nous avons fait une offre.”
Les projets de croissance de Jim McBride ne se sont pas arrêtés là. Au mois de janvier dernier, il a fait l’acquisition de deux sites de divertissement semblables à Mr. Skin : WWTDD et Last Men on Earth. Quelques jours après, il s’est offert la marque Egotastic, une autorité du web pour amateur de ragots sexy et de célébrités dénudés. Il affirme : “Nous avons acheté ces sites pour les mêmes raisons que Fleshbot. Nous étions fans à l’origine, et la plupart d’entre eux faisaient déjà partie de notre programme d’affiliation (une technique de marketing digital qui permet de faire la promotion d’un site chez l’un de ses partenaires, ndlr).”
Ces acquisitions vont permettre à Mr. Skin de poursuivre un nouvel objectif : “Nous voulions vraiment élargir notre réseau dans une direction plus “grand public” tout en restant fidèles à notre expertise originale : les célébrités, Hollywood et le pop culture pour hommes” explique Jim McBride. “Chaque site va être re-dessiné et importé sur notre plate-forme. D’autres acquisitions sont à prévoir. Nous prévoyons également de collaborer avec de grands éditeurs dont les contenus cadrent avec notre ligne éditoriale. Nous les hébergerons, les développerons et les monétiserons.” Mr. Skin voit loin : “Notre objectif est de devenir le leader du divertissement pour hommes sur Internet et le premier choix des annonceurs.” Jim McBride a fait beaucoup de chemin depuis ses cassettes Betamax. Preuve est faite qu’il faut parfois se laisser porter par l’adolescent excité qui sommeille en chacun de nous.
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