Alpha Channeling : nature, psyché et érotisme
Après avoir découvert les jolies dessins de Club Clitoris, je me suis un peu plus penchée sur la représentation sexuelle et artistique sur Instagram. On connait la tendance à la modération du réseau social quand un téton pointe le bout de son nez ou que quelques tâches de sang glissent le long des cuisses. Mais parfois, des règles strictes stimulent l’imagination et demandent aux auteurs de trouver des subterfuges pour les contrer. Je vous propose d’embarquer avec moi dans l’univers organique d’Alpha Channeling pour y découvrir une jungle au goût de l’érotisme, le terrain où Mère nature s’envoie en l’air.
On connait peu de choses sur cet artiste américain. Caché derrière son pseudonyme, Alpha Channeling est pourtant une vraie star d’Instagram avec plus de 350 000 followers. Etonnant et épatant à la fois pour un artiste qui illustre des corps dénudés et une sexualité assumée. En voyant les corps féminins si magnifiés, la sexualité si libérée et leurs rondeurs si enveloppantes, peu de place était laissée au doute : comme beaucoup, j’ai pensé que l’artiste, anonyme, était une femme. Et oui, les stéréotypes ont la peau dure puisqu’il s’agit en réalité d’un homme. Et quelle importance de toute façon ? Comme l’explique Alpha dans les lignes du Huffington Post : « Je n’évite pas délibérément de faire quelque chose de masculin, je dessine juste ce que je n’ai pas réussi à trouver en terme d’érotisme« .
Bien loin de la pornographie mainstream ou des dessins outranciers, l’artiste compose ses oeuvres avec une ligne enfantine aux couleurs printanières. Il nous invite dans un monde où le clitoris est une pétale, où le sexe bandé est fait de feuilles et de chair, où le plaisir est aussi pur que la rosée du matin.
Ses dessins jouent sur la corde sensible du sacré et du profane, entre la baise et l’expérience sensorielle : « J’aime l’idée de combiner les deux, sur le même piédestal les deux s’acceptent et se célèbrent » poursuit-il. On remarque donc rapidement combien l’artiste s’inspire de la mythologie et de la tradition taoïste qui voit dans l’expression de la sexualité un signe divin. Dans une composition toujours soignée, il jongle savamment en mélangeant les genres : « Je m’intéresse au Taoïsme et au tantra, à la pornographie et au folk, au BDSM et au divin, au mystique et au surnaturel » décrit-il à la journaliste Jerry Saltz. Il avoue aussi son penchant pour les oeuvres graphiques de Robert Crumb et la folie débordante de Fellini dans Le Livre de mes Rêves : « Il a documenté ses rêves tous les jours. C’est un peu comme les dessins faits par les enfants, dans l’immédiateté et l’urgence. Fellini devait tout recracher sur le papier. Je m’identifie beaucoup à ça. »
Désormais au rang des artistes les plus suivis d’Instagram, il continue son chemin en surfant sur la vague de l’éphémère : « Je suis conscient que ce que je fais peut disparaitre dans la seconde. C’est un sentiment étrange d’être sur le fil du rasoir, comme si mon travail était un château de sable qui pouvait être détruit par une vague en quelques minutes. Mais j’ai le sentiment que j’amasse une somme importante d’idées et de flux de communication. Il y a cette énergie, cette continuité » confie l’artiste, toujours au Huffington Post.
En plus de lui permettre d’illustrer les pages du cahier de coloriage édité par Pornhub aux côtés d’Apollonia St-Clair et d’Arrington De Dionyso, cette notoriété lui a valu une belle exposition à la Jack Hanley Gallery de New-York. Son univers paisible nous amène rapidement à nous questionner et à voir la sexualité plus en profondeur, dans toute son essence et dans sa beauté la plus pure. Une vraie poésie du corps et des sens.
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