Porn Sex Versus Real Sex : l’étude pro-porno qu’on aimerait croire
Les études scientifiques sur la pornographie disent tout et son contraire. Certaines suggèrent que les images explicites encouragent les comportements à risque et déforment les perceptions de la sexualité ordinaire, d’autres qu’elles ont un effet positif sur le bien-être et qu’elles désamorcent les comportements sexistes. Les deux camps se critiquent sans relâche : on s’accuse d’avoir une méthodologie inacceptable, un mauvais échantillon, un point de vue biaisé. Qui croire ? En tant que spécialistes de la culture porn, vous savez bien de quel côté nous nous trouvons. Pourtant, la dernière étude pro-X à laquelle nous aimerions tant croire nous a laissé dubitatifs.
Porn Sex Versus Real Sex: How Sexually Explicit Material Shapes Our Understanding of Sexual Anatomy, Physiology, and Behaviour a été publiée le 6 février dernier (au prix de 41,94 €). Ses auteurs, Cassandra Hesse et Cory L. Pedersen, deux professeurs de l’Université Polytechnique de Kwantlen, Canada, y découvrent que la consommation de « matériel sexuellement explicite » ne déforme pas la perception de l’anatomie, de la physiologie et du comportement. Au contraire, affirme l’étude, le fait de regarder du porno est lié à une meilleure connaissance du corps et de l’activité sexuelle, un bien-être supérieur et une opinion plus positive du sexe opposé. Génial ! Sauf que.
L’étude a été réalisée sur un échantillon de 337 volontaires, 259 femmes et 78 hommes majoritairement hétérosexuels, âgés de 15 à 58 ans. C’est sa première limite : difficile de généraliser les résultats obtenus à partir d’un groupe aussi homogène. De plus, comme le notent Cassandra Hesse et Cory L. Pedersen, « plusieurs études ont montré que les personnes qui se portent volontaire pour répondre à des études sur la sexualité sont différentes des non-volontaires à plusieurs niveaux : leurs positions vis-à-vis du sexe et du matériel sexuellement explicite tendent à être plus positives, leurs vues politiques plus libérales, leur expérience et leur permissivité sexuelle plus étendue ».
Autre problème : tous les participants ont été sondés sur Internet. Sans supervision, ils ont répondu à trois questionnaires portant sur leur situation socio-professionnelle, leur connaissance de l’anatomie et leur consommation de matériel pornographique. Malheureusement, la fiabilité de l’auto-évaluation est limitée. Côté nombre de partenaires, par exemple, de précédentes études ont montré que les hommes avaient tendance à en rajouter (par peur de passer pour des débutants) et les femmes à mentir par omission (par peur de passer pour des traînées).
Malgré ces limites, Cassandra Hesse et Cory L. Pedersen tentent d’expliquer leurs résultats. Pourquoi les gens qui regardent régulièrement de la pornographie ont-ils de meilleures connaissances anatomiques et physiologiques ? Peut-être parce qu’ils utilisent le X pour « remplacer ou compléter » des cours d’éducation sexuelle qu’ils considèrent comme trop « genrés et hétérosexistes » et pas assez pratiques. Les résultats pourraient aussi être pris à rebours ; peut-être que les personnes qui disposent de meilleures connaissances sexuelles sont plus à même d’être attirées par les images pornographiques. Bref, on n’est pas plus avancé. Le fin mot des porn studies, ce n’est pas pour tout de suite.
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