Dans la chaleur de Saint-Tropez
Je ne pense pas que la vocation première du Tag Parfait soit d’être envisagé en tant que ciné-club du porno français, cela étant, quand on est face à un chef d’œuvre du genre, il serait criminel de ne pas lui faire honneur. Et quel plus bel hommage qu’une ode à cette pièce maîtresse de l’art cochon à la française, intemporelle et légendaire pour ses nombreux aficionados, cinéphiles du poignet, avides de bons mots et de scènes d’anthologie.
S’il est un film de genre qui doit passer à la postérité, il s’agit inévitablement du légendaire « Dans la Chaleur de Saint Tropez » de Gérard Kikoine, sorti en 1982.
Le pitch, rapidement, car là n’est pas l’intérêt : Karine, jeune Parisienne en fleur, part en villégiature à Saint-Tropez avec une de ses copines, sans avoir oublier préalablement d’inventer un gros mytho à son père, magistrat. A peine arrivée à Saint Trop’, elle se retrouve entourée d’une bande de pervers, rompue à l’art du porno amateur. Au départ réticente (pendant au moins 30 secondes), celle-ci finit par sombrer dans le stupre et s’adonne aux plaisirs de la chair sous l’égide du Patron et de son acolyte en goguette, Eddy.
Rien de bien inédit, scénario classique mais prétexte à une enfilade de scènes mythiques de par leur innovation et leur originalité. Cette pantalonnade qui fleure bon le pastaga et les émois estivaux recèle d’éléments qui la transcendent à commencer par le casting, un « big three » éternel :
– Marilyn Jess dans le rôle de Karine, concurrente directe de Brigitte Lahaie à l’époque, Marilyn s’avère être une bombe sexuelle, qui , mise à part la toison bien fournie – 80’s obligent – n’a rien à envier aux starlettes actuelles. Forcément en avance sur son temps. Je lui trouve même des airs de Scarlett Johansson.
– Alban Cerray, acteur culte du porn français, dans le rôle du « Patron », par qui passe la mise en abyme. Il est celui qui réalise le film dans le film, armé de sa caméra et de son fidèle Eddy.
– Jean-Pierre Armand, l’homme aux 6.000 films (c’est lui qui le dit), ancien body-builder, qui incarne ici Eddy, le rôle de sa vie (le wall de sa page facebook est le théâtre permanent des fans du film qui ne cessent de citer ses dialogues).
Eddy est le catalyseur du film, une sorte de Barney Stinson du hard, celui qui tire tout vers le haut alors qu’il n’était censé qu’être au second plan. La revanche du quasi-figurant. Eddy est un personnage rabelaisien. Hors-norme, membré comme un âne et doté d’un accent marseillais sur-exagéré, Eddy représente la force de ce film. Toujours aux basques de son « patrongue » (sic), il enchaîne des scènes dantesques avec aisance et n’hésite pas à sortir son « manche de pioche » pour « tartiner la rondelle » de celle qui tombe entre ses gros bras musculeux.
Le film commence par un coup de maître : décor naturel, une plage de Saint Tropez, musique rythmée pseudo disco, une pauvresse enterrée jusqu’au cou et là pipe / cunni / cumshot… Tout bonnement ultime. Passe ensuite Eddy, en arrière plan, pour un florilège de saillies drolatiques, à base de « bite de marin » et de « pipe baveuse ». Non content de lui faire « reluire les molaires », Eddy annonce d’emblée la couleur et rajoute une couche de semence en guise d’introduction. C’est « party time » à Saint-Tropez, le reste n’est que littérature.
Entre deux séquences de cul débridé en pleine nature, le film se risque à des scènes complètement farfelues : un happening en plein port de Saint Tropez, une scène en boîte de nuit avec tout le casting, où l’on imagine aisément que le cadre du simple film de cul ait été largement dépassé. On croirait plutôt à un film de vacances avec des potes qu’on aimerait bien avoir – celui qui fait croquer sa conquête dans les chiottes du clubhouse plutôt que celui qui gerbe dans ta caisse en sortie de boîte. Certains éléments tendent à accréditer la thèse du « film de potes », comme cette scène, forcément improvisée, où Marilyn Jess se fait enfiler un distributeur de cartes à jouer. M’est avis que l’objet susmentionné avait du se trouver là par hasard et les acteurs ont l’air passablement éméchés.
Pour être bref, cet article est non-exhaustif et je laisse aux curieux la possibilité de découvrir par eux-mêmes ce bijou de famille. Sachez mes bienheureux que le film est sans limites dans le delirium coïtal, et c’est en apothéose que se termine chaque moment de bravoure d’Eddy et compagnie.
Que puis-je ajouter sinon que le visionnage de ce film s’impose à tout amateur de film X et aux autres, les hypocrites, ceux qui regardent le vieux porn pour les dialogues.
Source intarissable de répliques saugrenues, « Dans la chaleur de Saint-Tropez » doit trouver sa place au Panthéon du X. Puisse-t-il servir d’inspiration aux producteurs et réalisateurs de tout poil. Gloire à Jean-Pierre Armand (et aux dialogues/doublages scandaleux de Gérard Kikoïne), le Michel Galabru du X français, expert ès cabotinage et limage de cagoles , dont la logorrhée pagnolesque habitera encore longtemps les amateurs que nous sommes.
« ‘Fant de pute de pompe à merde, j’ai le manche de pioche »
Magnifique article, je fonce voir le film!
Ah ah ah ah ah mon John.
Tu me manques.
Super Article 😉