Le bilan 2012 : Lula
Il y a encore quelques jours, avant le énième fail de fin du monde, le Pech de Bugarach avait tout du sein : dressé vers le ciel, il fallait escalader ses flancs jusqu’au sommet pour trouver protection et [ré]confort. Maintenant que le soufflé est retombé, je me dis que c’était ça 2012, une montagne russe qui promettait la lune avant la grande dégringolade.
Je me suis fait quelques bleus, mais j’ai la peau dure et le cœur doux. Et de cette année qui ne rimait à rien, j’oublie les fausses notes – élections télé-réalité, homophobie latente, affaire Luka Rocco Magnotta, fusillades meurtrières et autres ouragans. Je ne retiens que les échappées belles.
D’abord New York où j’ai passé l’hiver. Ses gratte-ciels en érection défiant les ponts galbés, ses cougars et ses musées, ses soirées improvisées dans de vieux entrepôts, sa food porn juteuse et addictive. Ville effervescente, ville soda. S’abandonner à l’american dream… Et bim. Le retour au pays m’a fait l’effet d’une bifle mal dosée. Je m’étais autoproclamée « globe-trotteuse », Pôle Emploi a préféré « intermittente ». Du coup, j’ai décidé de voyager par procuration : au Québec, en Thaïlande, en Inde, en Espagne, au Japon et à Cochon Ville… Aucune frontière.
Puis le septième art, ma patrie. Après un long silence, Leos Carax a fait crisser les pneus d’une limo, celle de Monsieur Oscar dans son fascinant Holy motors. Holy shit. Honneur et bras d’honneur au cinéma français. Il filme un monstre qui bande à côté d’une princesse – Eva Mendes. Et dans une chambre noire, infernale et futuriste, il confronte deux corps en zentaï au fil d’une chorégraphie lascive. Salive et respiration éclatent sur les langues de ces amants interdits. Beau et sale. Toujours du côté de l’expérimentation, James Deen [mon héros] a temporairement raccroché les gants pour la cour des grands. Grand écran, grand écart. Il s’est acoquiné avec Lindsay Lohan et Gus Van Sant dans une fiction signée Bret Easton Ellis et Paul Schrader : The Canyons – sexe, drogues et Los Angeles. Lars Von Trier, lui, s’est lancé dans la réalisation de Nymphomaniac, les pérégrinations d’une nympho d’aujourd’hui, tandis que Sylvia Kristel, notre très chère Emmanuelle, a tiré sa révérence, nous fredonnant l’érotisme d’hier. Puis les Femen ont agité leurs tits devant les caméras en signe de protestation ; Fifty Shades of Grey est devenu un best-seller international ; Dorcelle.com, un site X par et pour les filles, a vu le jour… Le porn s’est ainsi marié au mainstream, pour le meilleur et pour le pire.
Enfin, le Tag Parfait et ses nouveautés. La création de sa boutique, la fécondité de son Tumblr, le sacre des petites… Ses deux ans et notre inoubliable mise à nue. Flashback : rendez-vous dans un studio du VIIe. Thomas Chéné et son assistant nous attendent avec un attirail de guerre, prêts à cristalliser nos boobs et bouilles d’anges. En retard, je débarque au milieu de ces garçons dévêtus qui boivent du champagne. Ça ressemble aux prémisses d’un gang bang de luxe voire au fantasme de certains de nos lecteurs, mais à cet instant précis, je ne rêve pas, je renoue avec ma phobie des photos de classe. Un sourire crispé, un téton trop raide, et ça me poursuivra jusqu’à la tombe. Heureusement, la famille veille au grain. Sisi. Sous les spotlights, se dessine l’adorable exhibitionnisme de Jizzkov, son caleçon étriqué aux motifs romantiques, sa folie tactile dont nos peaux se souviennent encore. Les corps d’éphèbes de Gonzo et Pornkid. L’audace de YoosF. Le port altier de GrosMikko. Les seins exemplaires de notre grammar nazi… L’amour sur la pellicule. [On a placé la barre haut pour 2013.]
Maintenant que le soufflé est retombé, je me dis que c’était ça 2012. Le nomadisme et la sédentarité. Le 2.0 et le vintage. L’amour et la violence.
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