DFHDGB : L.O.A.S x Hyacinthe x Krampf
Faux label, faux collectif, DFHDGB c’est l’association des rappeurs Hyacinthe et L.O.A.S et du producteur Krampf. Hyacinthe a sorti cette année la mixtape « Sur la route de l’ammour » qui succédait à son premier ep sorti en 2012 « Des hauts, des bas et des strings« . De son côté, L.O.A.S a sorti ces derniers mois deux clips remarqués, enfin Krampf vient de passer le bac (et sa majorité). Contre quelques bières, ils ont bien voulu nous parler de rap, de porn et de leur passion pour les beurettes.
Vous pouvez vous présenter ?
Hyacinthe : Nous c’est DFHDGB, un genre de collectif : Des Faux Hipsters Et Des Grosse Bites, un blaze choisi un peu au hasard. La base c’est nous trois (Hyacinthe, Krampf et L.O.A.S) et on travaille avec d’autres personnes.
Krampf : Il faut faire croire aux gens qu’il y a des structures pour qu’ils lâchent des pouces verts, mais en fait y’a rien, c’est juste un nom. Une sorte de faux label, faux collectif.
Par rapport aux autres dans le rap, vous vous situez comment ?
L.OA.S : On est les meilleurs.
K : Dans le rap blanc, une microsphère qui a essayé de faire du rap autrement, qui a essayé sur d’autres instrus et avec des textes différents. Si on devait rapprocher ça d’autres gens de la scène rap française, ça serait Butter Bullet et Orties (hahaha) même si je sais que le sujet est tabou.
H : On va se faire niquer avec ce que tu dis…
Vous écoutez quoi en rap français actuellement, à part Booba ?
K : Le dernier album de Aelpechea, la tape de Néochrome Hall Star Game et Grems.
H : J’ai pas mal aimé l’EP de Joke et le morceau « Première Sommation« de Mala qui m’a un peu traumatisé.
L : Des vieux LIM.
K : On est une grosse fanbase de LIM ici.
Pourtant vous êtes à l’opposé – socialement – de LIM.
H : On crie quand même.
K : Je ne trouve pas, y’a un coté écorché vif de la rue.
L : On vient peut-être de milieux différents, mais dans la manière de s’exprimer je pense qu’on se retrouve.
H : Dans le coté ultra à vif et sensible.
K : Il y a un côté super émo dans LIM.
Hyacinthe, je me souviens d’une soirée où on s’était croisés, tu ne passais que du Rick Ross, du 2 Chainz… des guerriers. Alors que dans ta musique, c’est plus dépressif : « je suis un peu une merde au final ». Y’a pas une contradiction entre ce que tu fais et ce que tu écoutes ?
H : Krampf avait trouvé l’équation pour faire du bon rap émo : « je suis une merde mais je vous baise ».
K : “Faire du rap emo sans être une victime”. C’est différent, y’a un peu d’égotrip quand même, souvent tu te vantes de trucs que t’as fait ou que t’as pas fait. 2 Chainz fait pareil, sauf qu’il oublie de dire qu’hier soir il a vomi à 2h du matin sur sa meuf et qu’il est triste parce qu’elle est partie .
L : Y’a une vraie sincérité dans ce que va raconter Hyacinthe par rapport à ce qu’écrivent d’autres rappeurs.
H : J’ai toujours aimé les trucs de guerrier de façon virale, jusque dans le rap français. J’écoutais que les trucs qui prenaient aux tripes, émo ou pas. À un moment t’as un mec qu’est tout seul avec sa bite et sa hachette et qui essaye de niquer tout le monde. Le côté « on n’a plus besoin d’être gentil, mignon et sympathique pour être poétique » tu vois. On peut être beauf et con comme je suis et avoir le droit de dire des trucs, d’être vénère et triste. Les beaufs ont aussi le droit d’être tristes.
L.O.A.S, t’as un son un peu plus dansant. Le problème en France c’est que quand on tombe dans ces sons-là, ça vire tout de suite sous-LMFAO pour gamins teubés de la forêt de St-Germain. Vous pensez qu’on a un complexe avec la pop ?
H : En rap mainstream français, y’a pas grand chose de bien. Aux Etats-Unis, tous les deux mois tu as le gros album mainstream qui défonce.
L : Je pense qu’on est archi mauvais.
K : Qui a fait de bons albums pop ? Aline ? C’est des niches tu vois, personne va écouter Aline, c’est pas de la pop.
L : C’est trop rétro.
K : Qui va sortir l’album de Rihanna en France ? Qui ? Personne ! Pas Zaho.
H : Mais dans le délire « beurette qui fait du R’n’B », Zaho c’est quand même le top.
L : Je pense qu’il n’y a pas de structures qui permettent aux artistes de se développer correctement et de faire des trucs solides, ou alors elles bousillent l’artiste.
Krampf, tu développes un style caillera un peu rétro, t’es un sniffeur de skets ?
K : C’est une totale invention du réalisateur du clip, qui voulait un mec un peu crypto gay caillera, en filigrane. Je n’ai jamais mis de Nike de ma vie, j’ai un coté un petit peu casual vaguement vintage, comme un adolescent.
L.O.A.S, tu peux nous parler de ton dernier clip Lady Gaga ?
L : L’idée débile, complètement mongole. Ce que je fais dans ce clip et dans l’autre, c’est tout ce que je faisais avant : jouer avec la réalité. Je vais agresser les gens dans la rue, et comme le font certaines personnes, avec des vraies armes.
K : Et tu as déjà vraiment fait ça ?
L : Ouais. En gros j’écris des lignes directrices, je les envoie à Nicolas Capus dont j’apprécie le travail, il me renvoie des idées, on écrit tout et à partir de là, une fois qu’on a un squelette, on improvise tout. Donc tout est écrit de A à Z et en même temps tout est improvisé du début à la fin.
Ça fait partie de la réalité ou de la com sur le clip ?
L : Un peu les deux, comme le clip finalement.
Vous avez grandi avec le porn, est-ce que c’est une inspiration ?
L : J’ai découvert le porn avec un bouquin érotique japonais dans la bibliothèque de mes parents. J’ai pas vraiment grandi avec le porn, c’était un peu plus tard.
H : Je ne sais pas si ça a été une inspiration dans la musique mais par contre il l’a été dans ma vie « personnelle ». Ça a un peu influencé ma façon de niquer, ça m’a montré l’existence de certains trucs auxquels j’aurais pas pensé. Du coup la seconde étape c’est d’essayer avec ma meuf. Mais, c’est plus un catalyseur. Par rapport à la musique c’est vrai que dans mes textes, vu que je raconte mes histoires avec les meufs, ça devient influencé.
Et ton rapport au porn au quotidien ?
H : J’aime que le gonzo, j’aime pas quand c’est trop écrit. Au quotidien, je suis un petit consommateur de porn, pas un expert. Je ne peux pas te citer 50 noms d’actrices. Mais je vais souvent voir les mêmes tag, j’ai mes petites habitudes.
C’est quoi tes tags ?
H : Je vais en profiter pour dire ma petite diatribe, le tag beurette était archi à la mode il y a quelques années, il a été remplacé par les milfs, c’est chiant.
Peut-être aussi parce que les beurettes étaient forcément associées dans le porn français à « déglinguée / humiliée / défoncée ». Est-ce qu’il n’y a pas un cliché raciste derrière ?
H : Grave, mais je pense aussi que c’est un tag qui est lié à ton adolescence : t’as des meufs rebeu dans ta classe qui sont hyper-canons, que pour des raisons X et Y tu ne peux pas serrer.
K : C’était aussi le fameux article du Tag.
H : Qui était incroyable d’ailleurs. Ça a longtemps été beurette pour moi, maintenant c’est difficilement trouvable. À part regarder des vieux porn de Yasmine d’il y a 4 ans, y’a plus grand chose d’intéressant. Et puis ils mélangent beurette et latina alors que ça a aucun rapport. C’est important de le souligner.
K : D’ailleurs je suis tombé sur un article de Vice qui disait comment draguer des meufs en soirée et dans la transcription, latina avait été traduit par beurette. « Elle sont super bonnes mais tu ne peux pas les pécho parce qu’il y a toujours un grand frère criminel derrière ». Du coup je vois la corrélation.
C’est assez marrant de voir la différence entre notre génération qui veut voir de la beurette et le porn français qui pense surtout à l’humilier…
H : À l’époque y’avait une espèce de profusion, maintenant c’est juste des trucs qui sont ultra limites ou simplement cheum esthétiquement.
k : Ce truc français en Afghanistan avec un militaire qui arrive comme en Provence dans une maison un peu détruite où y’a une beurette voilée, c’est vraiment atroce. Y’a le coté super français de souche derrière en mode « on va se venger ».
Et ils vont se branler dessus tout en l’insultant…
K : D’où le déglingage.
H : Alors que c’est les plus jolies meufs de France.
K : Pour moi c’est tout nouveau, donc je suis un peu perdu pour l’instant (rires). En dehors d’un point de vue plutôt pratique, j’ai toujours été fasciné par le porn et tout ce qui va avec. Et pas seulement à des fins onaniques. Quand on y croit, quand on se dit que les acteurs sont vraiment amoureux, qu’ils ont vraiment envie de baiser, quand y’a des indications émotionnelles. Ça, tu peux le retrouver dans plein de tags différents. Dans des trucs scénarisés des années 70 avec des poils partout ou avec du X-Art. Mais pareil, tu peux trouver des trucs sur X-Art qui vont être plats alors que parfois on pourrait y croire dans un Jacquie et Michel. Du coup j’ai pas vraiment de tag, à part teen, parce qu’elles ont mon âge.
Pas de milf, même la mère de Hyacinthe ?
K : Mais non ! mais respectez-vous un peu bordel ! De la décence ! Pourtant j’aime bien aller loin dans la perversion. Le mauvais fappeur que vous aviez posté, avec la meuf qui se fait traire, j’ai trouvé ça trop bien. Alors que la mère d’un pote, non putain ! J’ai une éthique : pas les daronnes.
L : Forcément, comme le premier truc que j’ai regardé c’était de l’érotisme japonais, j’ai eu une période vachement asiat plus jeune, sur ce truc-là.
K : Je tiens à dire que la qualité des meufs dans le porno japonais est assez ouf.
L : Comme Krampf, ça dépend beaucoup des nanas. J’ai envie d’y croire, de croire que la meuf prend son pied — pas qu’elle fait son boulot.
K : Ça c’est trop triste.
L : C’est comme au cinéma t’as envie d’avoir un bon acteur, un mec et une nana en face de toi, tu crois ce qu’ils sont en train de faire.
H : C’est pour ça que les gens kiffent autant Sasha Grey et des meufs comme ça, c’est parce que t’as tout le temps l’impression qu’elles y croient.
K : Ça me rappelle cette vidéo de casting incroyable, avec une fille au cheveux courts parce qu’on y croit d’un bout à l’autre. Ça pourrait être ma vidéo porn préférée.
H : Je vais pas forcément chercher les canons actuels, j’aime bien les trucs un peu atypiques, genre BBW.
K : Parce que même dans la vraie vie tu kiffes ça.
H : C’est vrai. Mais je ne suis pas forcément à la recherche d’un canon esthétique, la blonde des pays du nord trop bien gaulée, c’est pas forcément ce que je vais chercher.
Pourquoi vous faites du rap ? Pour devenir riche ou pour pécho des meufs ?
K : Si on voulait devenir riche, on ne ferait pas du rap. Si on voulait pécho des meufs on ne ferait pas de rap non plus.
L : Jamais eu besoin de faire du rap pour pécho des meufs.
H : Moi j’ai commencé j’avais 10 ans, du coup le rap c’est devenu un truc un peu normal, je ne pourrais pas m’en passer. C’est un truc comme toi tu vas chier tous les jours, moi j’écris tous les jours.
K : Comme des mecs vont à la pêche.
C’est qui les filles dans le clip Langue Maternelle ?
L : C’est un casting. Je suis très content de la vidéo et je suis très content de ces personnes-là parce que c’était mes premiers choix, je les avais dans la tête quand j’ai écrit le clip. Je suis allé sur un site internet de casting, j’ai vu la brune, la blonde, j’ai dit que je les voulais et les deux ont répondu présent et ont fait un super taff.
H : La blonde est quand même incroyable .
K : D’ailleurs y’a vraiment une team brune et une team blonde. Moi je suis vraiment pour la team blonde et je ne comprends pas la team brune.
L.O.A.S, tu parles de dope dans tes deux derniers clips, quel est ton rapport avec elle ?
L : J’ai été beaucoup plus jeune, j’ai fait plein d’expériences, aujourd’hui je me suis calmé et forcément ça ressort dans les textes. Je ne sais pas si c’est de la pudeur ou de la crainte d’en parler, en France, alors que c’est d’une banalité affligeante. Dans Langue Maternelle, j’ai été très surpris des réactions des gens parce que pour moi des personnes comme ces jeunes filles-là, j’en ai rencontré des centaines.
Bêtement j’ai voulu reproduire le clip de Smack my Bitch Up, en essayant de la réadapter au goût du jour et pour un clip de rap français. C’était un peu subversif à l’époque et on se rend compte finalement que 15 ans après, ça continue de choquer des gens.
H : Même dans son dernier clip où il arrose des gens de peinture, les gens sont choqués. Alors non c’est pas Saez « aimons-nous dans la poésie et on est gentils et il faut s’aimer, on est contre l’Etat à part quand il faut voter PS ».
K : Il vote PS Saez mec ?
H : Ouais
K : Je pense qu’il fait des têtes de mort sur des bulletins blancs plutôt.
H : C’est pareil.
Vous appréhendez comment les haters ?
L : J’adore, je profite de l’interview pour passer un grand merci à tous ces mecs-là. Je kiffe toutes les réactions de haine, d’un mec qui prend 5 minutes pour me descendre ou Hyacinthe.
K : L.O.A.S a beaucoup de haters sur internet, Hyacinthe un peu moins, et moi pas trop.
L : C’est un vrai plaisir de les lire, des fois y’a des mecs qui ont des trucs qui sont justes et je vais les prendre en compte, mais la plupart du temps c’est juste un message de haine. J’ai jamais pris la peine de répondre à qui que ce soit, y’a des gens qui s’en chargent très bien.
H : Moi par exemple, je suis attaché à un truc, c’est de ne dire que ce que j’ai fait. Si je dis que j’ai baisé une fille là ou que j’ai pris telle drogue, c’est que je l’ai fait, même si c’est qu’une fois. C’est dingue qu’avec cette démarche des gens vont trouver ça détestable, alors que tu es toi-même.
Photos par © Guilhem Malissen
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« K : Comme des mecs vont à la pêche. »
SIIIIIIIIIISIIIIIIIIIIIIII AIE LOSSAAAAA