Sora Aoi, l’ex porn star qui réconcilie le Japon et la Chine
« Elle est plus populaire en Chine que ne le sont Taylor Swift ou David Beckham » s’enchante le Sun. Elle, c’est Sora Aoi, l’une des plus emblématiques ex porn stars japonaises.
« Elle a fait office de professeur »
Vous ne connaissiez pas Sora Aoi (aussi sous le nom de Sola Aoi) ? Vous devriez. La BBC voit carrément en elle l’actrice qui a « initié toute une génération de Chinois à la sexualité« . Sora Aoi (« ciel bleu » en japonais), c’est l’histoire d’une serveuse de qui se retrouve pornstar pour les gros studios Kuki Inc. Son intronisation dans le milieu du film pour adultes se fait au début des années 2000. Aujourd’hui, son CV compte plus de 400 références sur R18.
La pornographie a beau être interdite en Chine, cela ne l’a pas empêché d’alimenter une fanbase fidèle. Car Aoi est emblématique d’une époque : ses premiers pas dans le game correspondent aux prémices du web social en Chine. C’est la gestation progressive des réseaux sociaux, des communautés en ligne et des sites de streaming qui a conduit à sa starification auprès de toute une génération abreuvée d’une nouvelle « porn culture » : celle des tubes et du téléchargement illégal. Bref, Sora Aoi, c’est l’AV Idol des jeunes, et il en est même qui l’envient.
« Pour une majorité d’hommes chinois qui n’ont pas pu se confectionner leur propre éducation sexuelle durant leur adolescence, Sora Aoi a fait office de professeur » témoigne un aficionado. Preuve de sa réputation : lorsqu’elle souhaite le Nouvel An sur Weibo (le réseau social chinois majeur), Aoi récolte plus de 830 000 like en deux jours. « Sora Aoi a choisi le bon moment pour débarquer sur le marché chinois, et sa popularité a contribué à ouvrir la Chine au monde…ne serait-ce qu’en terme de sexualité » dit d’elle Wai-ming Ng, professeur à l’Université Chinoise d’Hong Kong.
Dans un pays où le système scolaire consacre trop peu de place à la sex-ed et où la sexualité est encore source de nombreux tabous et complexes, les prestations de l’actrice font office de catharsis. Surtout que sa carrière déborde d’extrêmes : le porno gonzo, le fakeincest et l’imagerie bondage y enlacent des thémas bien hardcore – séquestration, suicide, prostitution… Comme un reflet déformé d’une jeunesse désabusée.
« Sora Aoi appartient au monde »
Mais Aoi n’est pas seulement la vedette de Sexy Teacher ou Lust of Nurse. Non, l’écrivain Wenwei Huang conçoit en elle le signe utopique d’une réconciliation Chine/Japon. Une figure assez iconique pour apaiser les tensions des deux pays, dans un climat sociopolitique encore remué par les secousses post-Seconde Guerre Mondiale. La performeuse millionnaire a en elle ce petit quelque chose de fédérateur, ce par quoi le porno dépasse la politique. « Sur l’internet chinois se diffuse un dicton populaire : les Iles Sensaku appartiennent à la Chine, mais Sora Aoi appartient au monde » développe l’écrivain. La phrase est plus forte qu’elle en a l’air. La question de la souveraineté des îles Senkaku est constante, et elle fut la source d’un conflit territorial entre la République populaire de Chine et le Japon en 1971. C’est dire si elle synthétise une tension socioculturelle encore vive.
A côté de cela, c’est comme si le sexe explicite pouvait faire oublier les dérives de l’Histoire, les conflits d’intérêt, les tensions sociales et toutes ces différences culturelles qui creusent un fossé entre les peuples. « Ces gens qui aiment Sora Aoi, peu importe finalement leur pays d’origine : ils ont tous l’impression d’appartenir au même groupe » détaille le professeur Ng à la BBC.
A l’heure de la globalisation, une vidéo de Sora Aoi a des allures de We are the World classé X. Cela fait sept ans que l’ex mannequin tokyoïte et ultra-kawai s’est retirée du game, officiant désormais en tant qu’actrice mainstream et popstar sucrée sur son temps libre. Mais son ombre plane encore sur une certaine contre-culture chinoise.
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