Vends ta Culotte suspend le compte d’Icy Diamond, une modèle transgenre
La plateforme française Vends ta culotte (VTC) a refusé l’inscription d’une femme trans sous prétexte qu’elle aurait un « sexe masculin ». Cette discrimination démontrant leur ignorance des identités transgenres a fait réagir Icy Diamond, travailleuse du sexe victime du bannissement. Plusieurs modèles du site lui ont apporté leur soutien en faisant grève ou en supprimant leur compte.
Pour celles et ceux qui ne connaissent pas VTC, il s’agit d’une plateforme française donnant à des travailleuses du sexe (TDS) la possibilité de vendre des vêtements (la plupart du temps portés comme des culottes ou des collants), des vidéos personnalisées ou des shows privés, et d’autres choses virtuelles. Comme son nom l’indique, Vends ta culotte est destinée aux « filles », c’est écrit dans le menu du site. Pour les « garçons », il existe Vends ton slip (VTS). Les spécialités des uns et des autres sont donc détaillées sur chaque profil, de nombreux fétichismes y sont représentés. Voilà une manière comme une autre de construire une nouvelle source de revenus pour les TDS. Cependant, certaines femmes se voient refuser le droit d’ouvrir leur boutique. C’est le cas d’Icy Diamond.
Icy est une TDS pratiquant l’escorting depuis quatre ans. Elle a développé une activité de dominatrice récemment et travaille à élargir son panel de services virtuels. Connaissant VTC de nom, elle décide de créer un compte pour vendre culottes et vidéos et envisage même se mettre à la cam. Elle s’inscrit sur la plateforme le 21 juin d’après son témoignage. Les ventes débutent doucement : « j’ai commencé à mettre des articles en vente et j’ai très vite eu du succès, j’ai eu beaucoup de visites et de messages, j’ai vendu un string et deux vidéos personnalisées. » Le 24 juin à 10h14, un mail lui apprend que son compte est suspendu, accompagné d’une proposition de déménager sur le pendant masculin : Vends ton slip. Malgré la mention ajoutée dès le début sur son profil de femme trans, les administrateurs ne semblent pas comprendre qu’ils font fausse route. Pour justifier cette suspension, VTC envoie une nouvelle réponse. L’utilisation du terme « sexe masculin » pose problème et montre leur inculture quant à ces questions.
Face à ce bannissement dû à sa transidentité, Icy réagit avec une certaine révolte. Elle tweete ce qu’elle ressent comme une injustice et n’hésite pas à rappeler que la discrimination quant au genre est punissable par la loi. Viennent alors les réponses de VTC. Nous en avons sélectionné quelques-unes qui montrent à quel point ils ne connaissent rien à ce sujet. (Attention, les termes sont assez violents.)
« Femme à bite et femme à chatte » ; « carte de membre » ; « choix de genre » ; amalgame entre les transformistes, les travestis et les femmes trans : des termes insultants et transphobes pour le moins. L’étude d’une « rubrique Transsexuels » ou la proposition de fusionner VTC et VTS ne semblent pas calmer les esprits face à de tels propos.
Icy Diamond a rapidement lancé un hashtag de boycott, afin d’alerter ses collègues de la situation. Cet appel a trouvé un certain écho chez les autres modèles. Certaines font la grève en refusant les nouvelles commandes.
Ça commence à se propager sur @Vendstaculotte ! 🔥
L’effet boule de neige #justice #vtc #transphobie #sexwork #camgirl #BoycottVTC pic.twitter.com/hSbgZZz0k0— Icy Diamond 💎🔞 (@IcyDiamondOf) June 26, 2019
D’autres expriment leur indignation et se font censurer promptement.
J'ai eu vent de cette histoire à travers les publications de soutiens de quelques personnes sur le site. J'en ai posté une bah putain la réactivité quoi. Supprimée au bout de 10mn avec en prime un mail bateau qui qui retransmet la réponse qu'ils t'ont envoyé et qui arrange rien
— Goddess Datura (@VenusAlmighty) June 26, 2019
D’autres encore se voient suspendre leur compte quant à leur prise de position.
Mon compte VTC a sauté à cause de mon soutien à @IcyDiamondOf
Priez pour le salut de mon compte en banque, mes sœurs, car il est venu le temps de son agonie pic.twitter.com/qqAAwrTeSP— Y'a interlo, Gaston ! (@Montespangoline) June 26, 2019
Certains clients rejoignent même le mouvement.
Le #boycottVTC continue ! pic.twitter.com/6sbUChgyhH
— Déesse M (@maitresseMa) June 26, 2019
Détail amusant, les tweets automatiques générés par le site ont posté une publication dénonçant le bannissement.
En France, il existe peu de sites permettant aux TDS de travailler et de vendre leurs contenus en toute indépendance. L’immense majorité est détenue par des entreprises étrangères, situées principalement aux États-Unis, ce qui augmente les frais de transactions bancaires, impose de comprendre l’anglais et oblige à se soumettre à la loi SESTA-FOSTA. L’opportunité de rester sur le territoire est donc souvent privilégiée par les modèles. Icy Diamond nous a dit être précaire, ce bannissement n’arrange pas sa situation financière. Le refus de la laisser travailler pour les raisons invoquées a fait déborder le vase. Elle est déterminée à lutter contre cette atteinte à son droit et souhaite entamer une procédure de plainte auprès du procureur de la République.
Bon, je vais constituer une plainte au procureur de la république, si des collègues veulent ajouter leur témoignage (avec captures d’écran) que ce soit pour transphobie ou parce que @Vendstaculotte a suspendu votre compte parce que vous vous êtes mise en grève, DM me #BoycottVTC
— Icy Diamond 💎🔞 (@IcyDiamondOf) June 26, 2019
A l’heure où nous publions, le représentant de Vends ta culotte n’a pas pu nous fournir de déclaration officielle.
[Edit du 28/06 à 16h05] Les infos arrivent au fur et à mesure de la part du site, ils nous disent dans un mail :
Pour information, dès cet après-midi (voire lundi si on n’y arrive pas), nous devrions réussir à mettre en place une rubrique pour les femmes transgenres.
Nous avons décidé de ne pas attendre la mise en place d’une solution définitive et techniquement longue à réaliser, et avons opté pour cette solution temporaire.
Dès cette solution en place, la personne suspendue pourra vendre à nouveau.
Photo de une issue du site Gender Portraits.
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