Agressions sexuelles : Ron Jeremy face à de multiples accusations

Le mouvement libératoire du #metoo, qui secoue l’industrie du spectacle, mais pas que, n’est pas prêt de s’arrêter. Ce sont aujourd’hui les vieilles affaires pas très reluisantes de Ron Jeremy qui ressortent du placard. Comme le développe une conséquente enquête signée Rolling Stone, l’emblématique producteur et hardeur moustachu se traîne de nombreuses accusations de harcèlement et d’agression sexuelle.

La légende du porno a pour lui une sale réputation. Le bruit court qu’il n’hésiterait pas à être trop tactile avec les actrices, fans et modèles au gré des salons. Juin 2017 : la cam model Ginger Banks compile à l’attention du grand public de multiples tweets, vidéos amateurs et articles suggérant la régularité de ces abus. Parmi ces témoignages, celui, frontal, d’une autre camgirl, Miss Lollipop : « j’ai posé auprès de Ron Jeremy le temps d’une photo, et il a glissé son doigt sous ma culotte, l’a introduit dans mon vagin« . Sans grande surprise, la légende du film X nie les faits. Ou presque. Il bafouille. « Je ne crois pas que cela soit arrivé. Je l’ai peut-être juste un peu massé : un petit tapotement, une petite pincette, une petite pression… Je l’ai fait oui, mais j’ai toujours demandé la permission avant » explique-t-il au Daily Beast. Pour éclaircir ces ambiguïtés, il précise que « beaucoup de femmes viennent [le] voir pour se faire dédicacer un sein« . Jeremy résume tout cela à du simple « flirt » et rien de plus.

Balance ton Jeremy

Manque de pot pour Jeremy, le #balancetonporc est passé par-là depuis, et de nombreuses accusations refont surface ce mois-ci. L’article mastoc de Rolling Stone en aligne pas moins d’une douzaine. Une femme dénommée Leslie Sanchez l’accuse d’avoir dédicacé son sein contre son gré lors du festival Exxxotica de Miami Beach en 2007. La performeuse Jessica Drake déclare d’ailleurs que ce type d’abus est très courant chez lui : elle y aurait assisté au cours de divers salons. Courant 2014, c’est justement pendant un de ces rendez-vous avec les fans, au New Jersey, que Jeremy aurait abusé de l’actrice Getty Dane, glissant des doigts dans son vagin lors d’un photoshoot. Kendra Sunderland, fameuse ex-Library Girl, affirme au journal américain que Jeremy « aurait léché son sein sans son autorisation » le temps d’une convention du X à Dallas. La hardeuse Amber Lynn fustige plus globalement son comportement lors des événements publics pour adultes : celui d’un « chien agressif » aux mains baladeuses.

Non seulement cette réputation n’a rien de neuf, mais elle outrepasse le stade de la dédicace non consentie entre deux flashs. Rolling Stone rapporte plusieurs témoignages. La performeuse Jennifer Steele aurait été violée à deux reprises par la vedette du X, il y a de cela dix ans. Ginger Lynn, l’icône X des années 80, accuse également Jeremy d’avoir abusé d’elle, en décembre 1983, lors d’un tournage. D’une confession à l’autre, l’article de Rolling Stone dresse le portrait d’un homme qui userait largement de son autorité dans le milieu afin de « dépasser les bornes« . Surtout, Ron Jeremy apparaît en performeur exploitant à l’envi les codes, idées préconçues et événements générés autour du porno pour satisfaire ses pulsions, dans un cadre dit « professionnel ».

Ginger Lynn accuse Jeremy de viol

« Je ne suis pas Harvey Weinstein »

Le 23 octobre dernier, comme l’indique AVN, les festivals ManyVids et Exxxotica ont déclaré qu’ils n’inviteraient plus l’acteur, pourtant grand habitué des lieux, suite à l’appel au boycott massif lancé par Ginger Banks sur les réseaux sociaux. Celui-ci nie à Rolling Stone ces nombreuses accusations de viol. Quant aux « attouchements forcés« , de sexes ou de poitrines, il le répète au média : dans ce genre d’événements, ce n’est que du show, du fun. « Je suis payé pour peloter, je touche les gens et les gens me touchent, c’est ce pour quoi je suis payé […] je n’ai rien fait de mal dans le cadre de ces conventions« . Jeremy poursuit de plus belle : « Je ne suis pas Kevin Spacey, Louis CK, Weinstein, Bill Cosby. Je n’ai jamais violé personne. Ces allégations sont de purs mensonges « . Ce dont on l’accuse relèverait, dit-il, du « non-fait« . Le sempiternel et déplorable argument du « c’est le job qui veut ça« . « Quand les gens m’ont dit que, vu mon métier, je ne pouvais que m’attendre à être agressée sexuellement… je ne m’attendais pas du tout ça. Cette normalisation me dégoûte« , déplore de son côté Ginger Banks. Un victim blaming transversal dans la société et qui fait écho aux affaires similaires dans d’autres sphères. Tout cela nous renvoie également à l’époque pas si lointaine du retentissant scandale James Deen. C’était il y a trois ans.

Les choses ont-elles évolué depuis ? Oui et non. L’industrie continue d’étouffer ses scandales, et les accusés de nier en bloc. Alors que les plaintes d’actrices se succèdent, la défense s’organise actuellement autour de Jeremy. Le comédien est soutenu par de nombreux cinéastes fidèles, comme le pape de la parodie Alex Braun : « ce n’est pas un violeur, mais un excité qui veut baiser des filles, comme 99 % de la population hétéro qui compose l’industrie du film pour adultes » avance ce dernier non sans maladresse. Pourtant, un vent nouveau semble souffler sur l’Autre Hollywood. Comme le démontrent les cas justement évoqués par l’acteur lui-même, les réseaux sociaux constituent aujourd’hui une forme d’empowerment pour celles et ceux qui restent dans l’ombre. Les grandes statures du business, jamais à l’abri d’un lanceur d’alertes ou d’un bad buzz, ne sont plus intouchables. Les mentalités, elles aussi, changent. La majorité des témoignages de fans, camgirls ou pornstars à destination de Jeremy viennent de femmes qui ne supportent plus d’être considérées comme des objets. Et il n’est pas étonnant de constater que certaines appartiennent à la nouvelle génération, celle qui est indépendante grâce à la cam et aux plateformes de vidéos. Conventions ou non, peu importe : le silence n’est plus de mise.

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