The Witch de Luna x James, acte fondateur de la Nouvelle Vague du fap
Le 31 octobre n’est désormais plus connu comme le jour d’Halloween, mais comme le jour où Luna x James ont mis un grand coup de pied dans la production pornographique. Le couple amateur français est célèbre pour la qualité de ses scènes vendues sur ManyVids. Jusqu’à aujourd’hui, malgré un travail poussé de réalisation, ils n’avaient jamais encore tenté de se fondre dans une narration cinématographique plus classique. C’est pourtant ce qu’ils font avec The Witch, un court-métrage qui n’a rien à envier avec le cinéma traditionnel.
Le film dure 7 minutes 30, on suit deux protagonistes qui ont maille à partir, l’un souhaitant supprimer l’autre pour d’obscures raisons. Poursuites, combat charnel, magie, vous auriez pu voir ça sur Netflix à la place des Nouvelles aventures de Sabrina. La réalisation est impeccable, l’histoire énigmatique et l’ambiance rendue à merveille avec un habillage sonore convaincant et une lumière très bien maîtrisée. Vous ne verrez rien de comparable sur Pornhub et en gratuit (et même ailleurs et en payant).
En effet, Luna & James ont sorti leur création gratuitement sur leur chaîne Pornhub, où l’on suivait habituellement leurs Sex Diairies, un vlog agrémenté de cul. Je constate personnellement l’avènement de la nouvelle génération de producteurs porno née du programme Models (qui partage les revenus publicitaires avec les vidéastes) dans ce chef-d’œuvre. Le tube s’est imposé comme un lieu d’expression artistique unique, car il est sans censure avec une audience large et une rémunération. Le couple le dit lui-même : « On verra comment les gens reçoivent le projet. Avec les Sex Diaries, on marche sur une ligne assez fine et qui change beaucoup de ce que le public de Pornhub a l’habitude de voir. On considère que la plateforme peut devenir le YouTube du porn, mais The Witch, c’est peut-être un peu trop pour le moment. »
On a tous notre idée de pourquoi les visiteurs traînent sur les tubes. Ils veulent se tripoter, mais la place est-elle disponible pour ouvrir Pornhub à davantage de créations moins masturbatoires ? Ils jouaient déjà l’ambiguïté avec leur vlog mi-sfw, mi-porno. Les gens paieront-ils pour du contenu moins XXX ? James le dit : « The Witch est une vidéo assez courte et pas vraiment du fap material, donc ça ne faisait pas sens de la rendre payante sur ManyVids. » La croyance que les consommateurs ne dépenseront pas pour une œuvre artistique pas vraiment explicite persiste dans l’esprit des créateurs. Le public ne serait pas prêt selon eux. Mais en dehors de l’aspect financier, ils appuient sur le fait qu’ils aimaient « bien l’idée de rendre ce projet accessible gratuitement et au plus grand nombre. »
Le court-métrage est un test. « On l’a fait pour voir ce dont on est capables. Aujourd’hui, on sait qu’en donnant 100% de nos compétences, ce court est le niveau le plus élevé de production qu’on peut atteindre. » Si le coup d’essai est transformé, ils sont prêts à se mettre au travail pour confectionner des contenus équivalents et les diffuser sur Pornhub. Mais que représente un test réussi ? Les Sex Diairies trouvent une certaine rentabilité avec l’audience qu’ils génèrent aujourd’hui. Mais pour ce style de projet, il faudrait « 3 à 4 millions de vues » pour qu’il n’y perde ni en temps, ni en argent. Donc, je vous encourage à mater et à en parler à vos ami·e·s, parce qu’une telle merveille de cinéma mérite d’être partagée et répétée. « S’il y a un public pour ce genre de court-métrage, on sera de retour avec un autre d’ici quelques mois ! C’était génial pour nous comme expérience. Après, vu la somme de travail, on en sortirait peut être 2-3 par an, pas plus. »
Ils ont bossé d’arrache-pied pendant deux semaines, quand une scène pour ManyVids leur prend deux jours. Si vous ne le saviez pas, le couple est autodidacte. Ils apprennent tous sur le tas et avec des tutos Youtube. James nous raconte la genèse du projet :
L’idée remonte au Vietnam, il y a peu près 3 ou 4 mois. J’avais entendu la musique Future is Gone de Pilotpriest. Faut savoir que beaucoup de nos idées créatives partent de musiques. J’avais envie de raconter une histoire sombre et dramatique, mais a l’époque impossible de trouver quoi. J’avais laissé tomber et il y a deux semaines je suis retombé sur cette musique. C’est à ce moment que l’idée de base de la vidéo m’est venue. J’en ai parlé à Luna et elle m’a dit : OK c’est cool, t’as deux semaines, je veux sortir ça pour Halloween. J’ai un peu flippé et dis que c’était pas possible. Elle a alors rendu le projet possible en créant le script final de la vidéo et un planning de ce qu’on avait à faire pas à pas.
On est souvent frustrés de la limite créative qui nous est imposée à travers le fait qu’on est que deux. Raconter des histoires quand on est à la fois devant ET derrière la caméra c’est super contraignant. Mais ça faisait longtemps qu’on voulait prendre le temps de sortir une vidéo plus axée sur la partie narration pour voir si on en serait capables et si on apprécie ce genre de projets. C’était vraiment intéressant comme expérience. Et d’ailleurs, je pense que dans le futur on aimerait faire des vidéos où on filme d’autres personnes. Être juste derrière la caméra, filmer et nous occuper de la partie créative.
Le futur semble radieux pour le couple qui vit à 100 % pour sa passion artistique. Ils viennent d’ajouter à leur cinéma porno une nouvelle note, ils s’inscrivent dans une volonté de créer sans contrainte. Ce court-métrage le prouve, ils souhaitent s’affranchir des règles qui régissent la pornographie et ce qu’on attend d’elle. Ils explorent, en parallèle de leur puissance artistique, les débouchés économiques possibles pour les producteurs. Au vu des chiffres de visionnage et des retours enthousiastes du public et de leurs pairs, ce type de projet apparaît comme viable. Luna et James sont deux forces libres et créatrices, ils s’expriment comme bon leur semble et défrichent avec The Witch une nouvelle façon de produire du contenu pas franchement porno. On retrouve en eux un écho de ce que fait Four Chambers. Confectionner des vidéos sans vouloir être mis dans des cases, imaginer l’impossible et le réaliser.
Pour terminer, James insiste sur un fait : « ce genre de projet, ce n’est vraiment pas pour avoir un retour financier. Pour nous, ce sont juste deux semaines de pur bonheur où on vit notre passion : on crée du contenu sans aucune règle ou limite, on essaie de réaliser quelque chose de beau. Le simple fait d’avoir réussi à aboutir ce projet pour nous est suffisant. Même si on fait 10 000 vues au final. » Quand je leur dis qu’ils ont tué le game, ils s’offusquent. Ils ne font pas ça pour impressionner ou prouver une quelconque supériorité. Ils souhaitent sans prétention ouvrir des portes et « encourager d’autres gens à faire du porn différent et à s’exprimer en tant que personnes sans honte ou censure. »
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