« RHÂÂL-HAN – Le fils des âges des filles pas farouches » de Howard McCock
Les habitués des internets le savent, en matière de porn, l’imagination n’a aucune limite et je ne parle pas uniquement de la souplesses des performeur.euses. C’est comme ça qu’on a pu voir des pseudos hommes et femmes préhistoriques s’envoyer en l’air joyeusement quand ils n’étaient pas en train de sucer un t-rex, ou de se faire baiser par un ptérodactyle. C’est dans cet univers mêlant joyeusement peaux de bête, tigres à dent de sabre, mammouth et cuni des cavernes que prend place l’album du jour : Rhââl-Han, Le fils des âges des filles pas farouches.
RHÂÂL-HAN FILS DE CRADO QUI N’EST PAS SON PERE
Parlons d’abord de l’histoire. J’avoue n’avoir jamais ouvert un album de la série originale de Rahan, je n’en ai donc qu’une vision approximative, bercée par les références qui ont pu être faites dans le reste de la pop culture, ou par les petites aventures qu’on pouvait trouver dans certains magazines de BD. Pour autant, c’est bien un pastiche de l’œuvre de Roger Lecureux et André Chéret que nous livre ici Howard McCock – on appréciera d’ailleurs le choix du nom de plume.
L’album se compose de trois aventures. La première nous raconte la rencontre de Rhââl-Han avec Gébobohou, magnifique femme des cavernes avec laquelle il s’adonnera à toutes les joyeusetés du cul, avant d’en tomber amoureux. C’est la préhistoire, et Rhââl-Han n’a clairement pas le time. Se retrouvant avec le petit Tégéveh, fils de Gébobohou, notre héros se retrouve ensuite précipité dans la deuxième aventure de l’album. Je dois bien avouer que celle-ci m’a laissé un peu sur le bord de la route, mais c’est clairement par mon manque de culture en bande dessinée classique puisque McCock nous propose un hommage aux héros de Edgar P. Jacobs en nous offrant la rencontre de deux univers, celui d’un professeur Backe Morti Mer, et de notre homme des cavernes à la tignasse dorée. S’il n’est pas dénué d’intêret, cet interlude parlera davantage aux connaisseur.euses, et un peu moins aux novices ou à ceux qui sont venus pour le cul, puisque c’est ce qu’on est en droit d’attendre chez Tabou Editions. La troisième aventure, est elle aussi sous l’angle du pastiche et de l’hommage puisque Rhââl-Han y rencontrera Elgébétéh, personnage librement inspiré de celui de Pellos, ou encore, les Pierrafeu. Les mots d’ordres de cet album sont donc : pastiche, humour, easter eggs, et, on doit quand même le dire, sexe façon Cro-Magnon des temps modernes, le tout dans un album épais de 48 pages.
AU PAYS DU PASTICHE
Publié dans la collection dédiée au genre, Rhââl-Han est revendiqué comme un pastiche, et les recherches que j’ai mené sur l’original m’ont confirmé une chose : sur ce plan, le travail est indéniablement réussi.
Je ne vais pas mentir, en voyant la couverture, j’ai eu peur que ma lecture soit gâchée par un humour uniquement graveleux qui n’est pas forcément le mien. J’y allais peut-être un peu à reculons, mais j’ai décidé de me lancer malgré tout et l’À Propos placé au début de l’œuvre m’a de suite confirmé que j’avais eu raison de passer outre mes préjugés. Dans cette préface, on découvre que McCock, on au-delà de son pseudo un peu lourd, est un grand adepte de la bande dessinée des années Pif Gadget et qu’il en a une connaissance très fine et pointue. Plus encore, on sent que le principal souci de l’auteur est ici de ne pas nuire aux œuvres originales, et ainsi d’offrir un petit coup de jeune aux héros de sa jeunesse, mais sans les dénaturer, et surtout, sans risquer de porter outrage aux originaux. Le travail de McCock n’est donc pas seulement dans la recherche de l’humour, mais aussi dans le respect et la précision. Même si je n’avais pas un quart des références faites dans l’album, celles que j’avais m’ont bien fait rire, et étaient amenées avec un certain talent. Je reste cependant convaincue que l’œuvre est faite pour les fans, puisqu’on passe évidemment à côté de certains aspects essentiels du pastiche. Pour autant, cela ne m’a pas rendu ma lecture désagréable ou compliquée, et j’ai passé un bon moment, en plus de profiter de jeux de mots de qualité, et ça, c’est toujours appréciable.
ELGEBETEH, LE REFLET D’UN PARTI PRIS MODERNE
On pourrait cependant craindre que McCock, en optant pour la parodie allait s’enfermer dans les caractéristiques des œuvres originales auxquelles il rend hommage, et fort heureusement, ce n’est pas le cas. En plus d’offrir des cases – et particulièrement s’agissant des cases à caractère sexuelles – avec une colorisation tout à fait singulière et vraiment réussie, aux tons vifs et aux accents monochromatiques, McCock entreprend aussi une certaine représentation de la diversité des sexualités. On ira pas jusqu’à dire que l’album est exemplaire sur l’inclusivité des corps représentés, mais clairement, il y a un effort fait. Ainsi, dans Rhââl-Han, les femmes se touchent entre elles, mais les hommes ne sont pas en reste puisqu’ils font la même chose. On appréciera d’ailleurs que la représentation du rapport homosexuel féminin ne soit pas totalement sujet au fétichisme puisqu’il invite simplement Rhââl-Han et son compagnon à faire la même chose.
Le personnage d’Elgébétéh est encore l’incarnation de ce désir de représentation. En effet, au-delà de son prénom, référence explicite au mouvement LGBTQ+, le personnage avouera à notre héros être issue de la tribu des « Chimal » , et on ne va pas se mentir, voir une femme à bite dans un album de BD dont la couverture nous laissait plus que sceptique sur le ton du livre, c’est une vraie bonne surprise, et cela particulièrement parce que Elgébétéh n’est pas traitée ici comme un fétiche, et ne pose pas spécialement question au héros. Carton rouge donc au nom de la tribu mais aussi, à l’explication « En quelques sorte, je suis une femme qui n’est pas une femme, ou plutôt un homme qui n’est pas un homme » . On aurait aimé mieux. (J’avoue m’être demandé si le caractère simpliste et daté de l’explication était justifiable par le caractère simplet de Rhââl-Han, mais même si c’est le cas, c’est un faux-pas pour moi.) Pour autant, on ne peut nier qu’il y a là un travail de représentation de la diversité, et c’est suffisamment rare pour être remarqué. Un petit effort encore pour McCock dans cet apport de modernité dans la BD tradi des années 70.
En bref, Rhââl-Han n’est probablement pas l’album sur lequel vous aurez une envie irrépressible de glisser la main entre vos cuisses, mais ça n’en demeure pas moins un excellent album, avec des scènes de cul vraiment jolies, et un gros travail réalisé sur le plan de l’hommage, qui saura ravir les amateur.ices des aventures de Rahan, ou celleux qui ont été bercé·es par le personnage de l’homme des cavernes. Et pour eux, comme pour les autres, c’est une lecture légère, pendant laquelle on passe un chouette moment.
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